Méditation pour le 1erjanvier : Sainte
Marie, Mère de Dieu
Dans la lettre aux Galates, saint Paul nous livre
aujourd’hui, en quelques lignes très denses, un de ces raccourcis théologiques
dont il a le secret : tout le mystère du salut en quatre phrases :
tout y est, ou presque : le Père, le Fils et l’Esprit Saint, le temps et
l’éternité, l’incarnation et la rédemption, l’adoption filiale et l’héritage
futur...
Voyez plutôt :
Lorsque les temps furent accomplis...
Dieu est en-dehors du temps, mais Jésus, par le mystère de
l’Incarnation, entre dans le cours du temps et donc dans le devenir : il
va naître, il va grandir, il va se soumettre aux règles de la vie et de la
société, il va se faire solidaire de ceux qui sont soumis à la Loi, il va
connaître la souffrance et la mort. Parce qu’il est totalement solidaire des
hommes et parce que, en même temps, il est parfaitement Fils du Père, un
mystérieux échange va pouvoir s’opérer entre Dieu et l’humanité. Lui qui est
Fils unique du Père va permettre aux hommes de devenir « fils » comme
lui et d’avoir donc un droit sur l’héritage. Quel héritage ? Le droit
d’appeler Dieu « Abba, Père », la vie divine elle-même.
Lorsque les temps furent accomplis...
à la charnière d’une année nouvelle, nous aimons méditer sur
le temps qui passe : nous faisons le bilan de l’année écoulée, nous
formons des projets pour les mois à venir. Nous sentons avec plus ou moins
d’acuité la morsure du temps qui passe : nous voyons bien qu’il y a des
choses qui sont passées, qui ne reviendront plus et que les minutes glissent entre
nos doigts comme de l’eau qui coule...
Mais nous reconnaissons aussi qu’il y a des moments de notre
vie qui semblent « sortir du temps », des instants de grâce que nous
avons vécus un jour et qui, depuis, ne nous ont pas lâchés, comme si le temps
n’avait pas de prise sur eux. Dans le temps chronologique qui passe et qui
coule sans arrêt, il y a des moments de grâce où le temps s’arrête et devient
éternel.
L’Incarnation du Fils de Dieu, le jour où Jésus est venu au
monde, a été un temps de grâce par excellence, ce que saint Paul désigne ici
comme « la plénitude des temps ».
Et cela s’est passé par Marie.
Marie se tient là où il y a naissance. À la crèche et à la
croix. Et ce n’est pas un hasard si nous fêtons Marie le 1er
janvier, à la naissance de l’année.
Ce texte de Paul a d’ailleurs été choisi pour la liturgie
d’aujourd’hui entre autres parce que c’est le seul passage où Paul parle de
Marie. Et encore : en toute discrétion ! Pour dire que Jésus est
vraiment devenu homme parmi nous, Paul dit ceci : « il est né d’une
femme ». Quel rôle inouï imparti ainsi à Marie !
J’en appelle aux mères parmi nous. Elles doivent le savoir
par expérience : c’est l’enfant qui fait de sa mère une mère. L’enfant,
dans son extrême dépendance, dans sa soif de vivre, oblige sa mère à trouver
les gestes tendres et justes qui le sauveront : le vêtir, le nourrir, le
bercer...
Quand le Verbe s’est fait chair, quand le Fils de Dieu est
entré dans la condition humaine, il a choisi Marie pour remplir ce rôle-là à
son égard. En règle générale, nul ne choisit ses parents. Nul ne choisit non
plus ses enfants. C’est toujours un cadeau, une mission.
Mais Dieu a choisi Marie.
Elle se trouve dans ce cas unique où elle peut dire qu’elle
a été « choisie » par son Fils pour être sa mère... Elle était trop
simple, trop humble pour penser à tout ça, évidemment, mais elle a dit
« oui » à la visite de l’ange, un oui conscient, radical, absolu, au
travail de la grâce en elle. Et cet enfant lui est venu. Et elle a trouvé à son
égard les gestes de tendresse les plus naturels du monde : comme une jeune
mère attentionnée, elle l’a vêtu, nourri, bercé...
Marie ne dit pas grand-chose dans l’évangile de Noël. Toute
sa parole est dans cet enfant. Mais elle « gardait tous ces événements et
les méditait dans son cœur ». Cependant, j’en suis sûre, elle parlait
certainement à son nouveau-né, elle lui chantait des berceuses. Peut-être, pour
ce faire, a-t-elle emprunté les paroles de Moïse et d’Aaron dans le passage de
Nb 6 : « Que le Seigneur te bénisse et te garde, que le Seigneur
fasse briller sur toi son visage (mais le visage de Dieu, c’est toi, mon
tout-petit), que le Seigneur se penche vers toi (mais Dieu qui se penche
vers moi, vers nous, c’est toi, mon tout-petit), que le Seigneur se tourne
vers toi, qu’il t’apporte la paix (mais c’est toi, mon petit prince, qui
m’apporte la paix)... »
Et elle le berce en lui chantant les mots qui seront sa
mission : être au milieu des hommes l’image du Dieu invisible, le
resplendissement de sa gloire, le porteur de paix.
Prions, dès lors, en ce jour de l’an, en ce jour de prière
pour la paix dans le monde, prions avec Marie en berçant l’Enfant-Dieu.
Confions-lui cette année nouvelle et accueillons sa bénédiction en nous ouvrant
au même Esprit qui nous fait dire « Abba, Père ! », en redisant
les mots que l’Esprit nous inspire :
Que le Seigneur, en toi, nous bénisse et nous garde.
Qu’il fasse resplendir sur ton visage sa propre image.
En toi, qu’il se penche vers nous avec toute sa
tendresse, qu’il nous apporte la paix.
Sr Marie-Raphaël
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