3ème dimanche de Pâques A
Merci à saint Luc pour ce magnifique texte que nous
connaissons bien et que nous entendons toujours avec plaisir... sans doute
parce que nous pressentons que ce chemin d'Emmaüs est aussi le nôtre, est le
chemin de notre foi.
Les disciples d'Emmaüs avaient tout quitté pour suivre
Jésus... Ils l'avaient accompagné sur les chemins de Palestine, ils avaient
écouté sa Parole, vu ses miracles... Pourtant, au moment clé de sa vie, au
moment que Jésus appelait son heure, où il touchait le sommet de l'oeuvre pour
laquelle il avait été envoyé par le Père et où il révélait jusqu'où va l'amour
de Dieu pour l'homme, ses disciples l'ont quitté, c'était trop fort !; ils
se sont dispersés, rentrant chacun chez eux, le coeur lourd de tant de rêves
déçus : « nous qui espérions qu'il serait le libérateur
d'Israël ! »
Les voilà donc tristes, enfermés et noyés dans leur
souffrance et leur incompréhension, dans leur honte peut-être aussi de s'être
laissé duper.
C'est alors que Jésus les rejoint pour faire route avec
eux. Merveilleuse délicatesse ! Ceux qui l'avaient laissé seul sur le
chemin du Golgotha. il les rejoint sur leur propre chemin d'amertume et il
marche à leurs côtés.
« Mais, nous dit st Luc, leurs yeux étaient aveuglés
et ils ne le reconnurent pas »
Voilà qui nous étonne ! Ils ont vécu si longtemps avec
Jésus et ils ne le reconnaissent pas ! C'est que la résurrection n'est pas
simple réanimation du cadavre de Jésus, elle n'est pas retourà la vie
mais entréedans une vie nouvelle. Dès lors, les yeux du corps ne
suffisent pas pour percevoir la présence nouvelle du Ressuscité. Il faut,
pour les disciples, comme pour nous aujourd'hui, les yeux de la foi. C'est
ce regard nouveau que Jésus va éveiller en eux tout au long du chemin. Et la
manière dont Jésus va s'y prendre est bien précieuse pour nous car elle met en
évidence 3 piliers sur lesquels s’appuie notre foi au Ressuscité, 3 piliers qui
sont aussi 3 éléments importants pour toute catéchèse,
1er pilier : l'Ecriture
Jésus va puiser dans l'Ecriture tout ce qui le concerne et
vient l'appliquer comme un baume sur le questionnement, l'incompréhension des
disciples.L'Ecriture, la Parole de Dieu n'est pas un livre qui
distillerait un ensemble de connaissances, elle n'est pas enfermée dans un lieu
ou une époque... Lorsque nous la lisons, elle s'écrit, si l'on peut
dire, comme en surimpression sur le livre de notre vie. Et c'est la
raison pour laquelle Jésus a d'abord invité les 2 hommes à mettre des mots sur
leur vécu. « De quoi parliez-vous en chemin ? » Ainsi
Jésus les rejoint non seulement sur le chemin qui les conduit à Emmaüs mais
aussi et surtout sur le chemin de leur coeur pour leur rappeler les manières de
Dieu qui transparaissent dans l'histoire du peuple d'Israël et qui nous disent
encore et toujours sa manière d'aimer.
2ème pilier : le pain partagé
Arrivé à Emmaüs, « faisant semblant d'aller plus
loin » Jésus ne s'impose pas. Il laisse un moment ses amis face à
eux-mêmes... le temps de prendre conscience du chemin parcouru en leur coeur.
Ils ne sont plus repliés sur eux-mêmes comme au début du récit, ils ne sont
plus hypnotisés par leur désespérance mais ils se sont ouverts et sont
maintenant capables d'inviter l'étranger à rester avec eux.
Jésus entre donc dans la maison et au moment de se mettre à
table, il pose un geste qui le révèle : comme à la multiplication des
pains (ou plutôt la division des pains car Jésus a simplement invité ses
disciples à partager les pains qu'ils avaient, ce qui a permis à tous d'être
rassasiés), comme à la dernière Cène, il prend le pain, dit la bénédiction,
le rompt et le leur donne.
Alors leurs yeux s'ouvrirent mais Lui,disparut à leur
regard, manifestant par là que l'essentiel n'est pas dans ce que leurs yeux ont
vu mais dans ce que leur foi a reconnu.
3ème pilier : le témoignage
A l'instant même où ils reconnaissent Jésus les disciples se
lèvent et retournent à Jérusalem. « Ils se lèvent »: le verbe grec,
utilisé par saint Luc, est celui qui exprime la résurrection. En reconnaissant
Jésus ressuscité, ils font eux-mêmes l'expérience d'une résurrection intérieure
qui les relance a toute vitesse sur la route qu'ils venaient de parcourir si
lourdement... et cela pour quoi ? Pour retrouver la communauté des
disciples et leur partager ce qu'ils venaient de vivre. La foi ne se vit pas
seul, la foi se nourrit, se construit, se transmet en communauté.
Ce n'est pas pour rien que dans nos célébrations eucharistiques,
après avoir écouté la Parole et avoir communié au Corps et au Sang du Christ
ressuscité, nous sommes envoyés sur un chemin de communion fraternelle.
La paix et la joie qui ont renouvelé nos coeurs, "notre
cœur n'était-il pas tout brûlant ?…" il nous faut les partager et
à l'exemple de Jésus lui-même, il nous faut déposer la parole entendue sur les
plaies et les angoisses de nos frères et soeurs enfermés sur leur chemin de
désespérance.
Oserons-nous, à l'issue de nos célébrations, nous
transmettre le feu nouveau qui a fendu la nuit pascale et qui à présent brûle
dans nos coeurs ? Oserons-nous, dans une joyeuse pagaille pour reprendre
l'expression du père Poupart, nous annoncer les uns aux autres « Le
Christ est ressuscité, Il nous a parlé, pour nous il a partagé le pain et nous
l'avons reconnu. Oui, Il est vraiment ressuscité ! »
Sr Elisabeth
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