(méditation
pour le 2ème dimanche de Carême année A: Genèse 12, 1-4a ;
Psaume 32 ; 2 Timothée 1, 8b-10 ; Matthieu 17, 1-9)
Pars...
quitte ton pays, va vers le pays que je te montrerai. Et Abraham partit... Il partit sans savoir où il
allait, précise la lettre aux Hébreux[1]. Je me demande combien d’entre nous,
auraient fait de même. Partir sans savoir où on va ! Bien sûr nous sommes
ici dans le contexte de civilisations nomades ou semi-nomades. Mais quand
même ! Partir sans savoir où on va, sur un simple appel du Seigneur !
Et pourtant, profondément, ne sommes-nous pas tous en cette situation ?
Tous nous avons été appelés à l’existence, tous nous sommes nés un jour, et
depuis nous faisons route sur cette terre, comme à tâtons. Les images du séisme
au Japon ou des violences en Lybie et ailleurs, nous ont bouleversés. Où
allons-nous ? Abraham partit sans savoir où il allait... si ce n’est qu’il
répondait à un appel du Seigneur. Et nous sommes embarqués avec lui !
Abraham
partit, comme le Seigneur le lui avait dit. A cet ordre de départ, le Seigneur joint une
promesse : Je ferai de toi une grande nation : promesse
incroyable quand on sait que Abraham a alors 75 ans, qu’il n’a pas d’enfant,
que son épouse est stérile et âgée comme lui. Je te bénirai continue le
Seigneur, tu deviendras une bénédiction,... en toi seront bénies toutes les
familles de la terre. Avec notre Dieu, une élection est une mission. Les
dons que le Seigneur fait aux hommes sont toujours en vue du partage. Tu
seras bénédiction. Et qu’est-ce que la bénédiction divine ? Il ne faut
pas comme l’indique l’étymologie latine la réduire à un « dire
bien », un « dire du bien ». La bénédiction, beraka en hébreu,
est un don de Dieu par lequel il partage son pouvoir de donner la vie, et sa
seigneurie sur la création. Relisez si vous le voulez les récits de création
dans le livre de la Genèse.
La
bénédiction offerte par Dieu est véritablement un partage de sa vie divine.
Qu’est-ce que cela signifie concrètement ? Abraham devait bien se le
demander, mais il fait confiance. C’est pourquoi il est notre père dans la foi.
Il est parti sur la simple invitation du Seigneur vers ce partage de vie
divine. Quitterons-nous à notre tour nos sécurités, pour mettre nos pas dans
ceux du Seigneur ?
Oui, nous
le ferons en redisant notre confiance avec les versets du psaume : Seigneur,
ton amour soit sur nous, comme notre espoir est en toi ! Nous attendons
notre vie du Seigneur. Il est fidèle en tout ce qu’il fait.
Et comment
vivre cette vie humaine ? Dimanche dernier, nous avions suivi Jésus au
désert. Nous l’avions contemplé partageant notre condition humaine, dans la
lutte contre le tentateur, celui qui veut semer la division entre nous, entre
Dieu et nous. Dans ce rude combat, Jésus, pleinement homme nous a ouvert la
voie de la résistance. Prenant appui sur la parole de Dieu, il a remporté pour
nous la victoire.
Aujourd’hui,
c’est le Père, et non plus le tentateur qui nous entraîne sur la montagne. Jésus
a déjà longuement parcouru les routes de Galilée, s’il a quelques fois
rencontré l’enthousiasme des foules, il a tout autant connu l’opposition des
responsables religieux de son époque. Et peu à peu, il a vu l’inéluctable
devant lui. Il a compris que son message, le message d’amour du Père, cette
lettre d’amour qu’il est lui-même, n’était pas reçu. Il a compris que s’il
demeurait fidèle à sa mission, il allait le payer de sa vie. Il l’a annoncé à
ses disciples, qui en ont été choqués, bouleversés. Le fils de l’homme va
être livré, crucifié, et le troisième jour il ressuscitera. Et comme si
cela ne suffisait pas, il a annoncé que ses disciples connaîtraient eux aussi
un chemin difficile. Il les a par avance exhorté à prendre leur croix. C’est à
ce moment que se situe l’épisode de la transfiguration qui vient de nous être
proclamé. Que voyons-nous ? un instant de grâce ! un moment de
lumière. Sur la face de Jésus, rayonne l’amour du Père. Il est transfiguré. Et
la voix du Père, confirme la parole donnée au baptême : celui-ci est
mon Fils bien-aimé, en qui j’ai mis tout mon amour, et la voix poursuit à
l’intention des disciples : écoutez-le !
En Jésus
transfiguré, nous découvrons, le Fils de Dieu. Alors que dimanche dernier nous
l’avions contemplé, vrai homme, aujourd’hui, il nous est révélé vrai Dieu. Les
disciples reçoivent là un avant-goût du Ressuscité. Ils sont effrayés devant
cette révélation. Mais Jésus s’approche, les touche, et leur dit :
« relevez-vous » (un verbe de résurrection) ! Il les entraîne
par avance en sa résurrection. Relevez-vous. Voilà où ils vont. Voilà où nous
allons. Dieu s’est fait homme pour que l’homme devienne Dieu[2].
Pour les
aider à traverser l’épreuve de la passion et de la mort, celle de Jésus et la
leur propre, les disciples ont reçu ce moment de lumière, de grâce. Ce moment
nous est offert à nous aujourd’hui, pour nous fortifier sur le chemin, comme il
était offert aussi à Timothée.
Le chemin
est parfois empli d’obstacles. St Paul lorsqu’il écrit à Timothée veut
l’encourager. Il l’invite à traverser courageusement les épreuves du chemin les
yeux fixés sur Jésus. La grâce donnée dans le Christ Jésus avant tous les
siècles, est devenue visible à nos yeux, dit-il, car notre Sauveur, le
Christ Jésus, s’est manifesté en détruisant la mort, et en faisant resplendir
la vie et l’immortalité par l’annonce de l’Évangile !
Cette
annonce c’est à nous qu’elle est faite aujourd’hui. Et en participant à cette
eucharistie, nous participons déjà à la résurrection de Jésus. Que cette
communion nous entraîne plus avant en la vie divine à laquelle nous sommes
appelés tous et toutes.
Sr Thérèse-Marie
[1] 11,8
[2] " Car telle est la raison pour laquelle
le Verbe s’est fait homme, et le Fils de Dieu, Fils de l’homme : c’est
pour que l’homme, en entrant en communion avec le Verbe et en recevant ainsi la
filiation divine, devienne fils de Dieu " (S. Irénée, hær. 3, 19, 1).
" Car le Fils de Dieu s’est fait homme pour nous faire Dieu " (S.
Athanase, inc. 54, 3 : PG 25, 192B).
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