méditation
pour le 7ème dimanche de Pâques B
Entre
Ascension et Pentecôte, nous assistons à la naissance de l’église. Tous les
ingrédients semblent réunis pour que cette réalité nouvelle prenne corps. Dans
les lectures d’aujourd’hui, nous pouvons découvrir ces ingrédients.
D’abord, il
y a des hommes et des femmes. Ils forment un groupe, ils sont unis, mais ils
sont aussi chacun là à titre individuel. La 1ère lecture nous
dit : « en ces jours-là, les frères étaient réunis au nombre
d’environ 120 ». Un petit nombre donc (cela pourrait tenir dans cette
église), mais déjà conséquent. De ce groupe émergent les Douze. Ou plutôt les
Onze, puisque Judas brille par son absence. Et Pierre qui ressent le besoin de
revenir au nombre symbolique de Douze, parce que le chiffre 11 est boiteux, il
lui manque quelque chose, tandis que le 12 est stable, il fait allusion aux 12
tribus d’Israël, il exprime une plénitude, il est comme une base solide sur
laquelle pourra s’édifier la construction-église.
Parmi les
ingrédients qui font l’église, nous voyons donc dès le départ la prise en
compte d’une fragilité, mais aussi le désir de faire l’unité, malgré les
faiblesses humaines.
Et quel
sera le rôle des Douze ? Gouverner ? Non. Enseigner du haut de la
chaire de leur infaillibilité ? Ce n’est pas dit. Ce qui est clair, c’est
que leur rôle sera d’offrir à l’église la base solide de leur témoignage.
Ils sont choisis parce qu’ils ont été témoins privilégiés de l’avant et
de l’immédiatement après Pâques : ils ont connu Jésus de Nazareth
en Galilée, ils ont été témoins de sa vie publique, de sa mort tragique, et ils
l’ont vu ressuscité. « Nous qui avons vu, nous attestons... », écrit Jean
dans la 2ème lecture.
Le
témoignage, c’est donc la base de la parole ecclésiale. Une parole d’homme à
homme, qui passe de bouche à oreille et se propage jusqu’à nous. Mais
attention, ce n’est pas comme dans le jeu du téléphone sans fil : une
parole qui se déforme de plus en plus parce qu’elle perd le lien avec la parole
du départ. Dans l’église, le témoignage passera de génération en génération,
certes, mais chaque génération doit refaire le lien avec la parole originelle,
repartir du socle solide offert par le témoignage des Douze.
Un autre
ingrédient qui constitue l’église, c’est donc sa profession de foi, et celle-ci
s’appuie sur l’écriture. Un exemple de profession de foi se trouve dans la 2ème
lecture, quand Jean dit : « Celui qui proclame que Jésus est
le Fils de Dieu, Dieu demeure en lui, et lui en Dieu ». Il faut donc
« proclamer », confesser sa foi en Jésus Fils de Dieu. Et ce faisant,
on entre dans une relation très intime avec Dieu, on entre dans la Trinité
(« Dieu demeure en lui et lui en Dieu »).
Mais il ne
suffit pas de professer sa foi : il faut la vivre. L’église, communauté
des croyants, se caractérise par une certaine façon d’être. La
« loi » qui régit cette communauté, sa ligne de conduite, se résume à
un mot : l’amour. « Mes bien-aimés, dit Jean, puisque Dieu nous a
tant aimés, nous devons nous aussi nous aimer les uns les autres ». Et ce
n’est pas simplement un amour qui imite l’amour de Dieu pour nous, c’est
l’amour même de Dieu que nous devons faire circuler entre nous. Jean
écrit : « Si nous nous aimons les uns les autres, Dieu demeure en
nous et son amour atteint en nous sa perfection ». C’est inouï, c’est
comme si l’amour de Dieu était « inachevé », « imparfait »,
aussi longtemps qu’il ne circule pas entre les hommes. L’amour de Dieu atteint
sa perfection dans l’amour qui circule entre les hommes. Quelle responsabilité
pour nous ! Imaginez un père qui a beaucoup d’enfants et dont les enfants
ne s’aiment pas entre eux : c’est déchirant pour son amour de père. Il
fera tout pour que ses enfants s’aiment entre eux. Et pour cela, il aimera
chacun de ses enfants individuellement d’un amour total et unique.
Voici donc
quelques-uns des ingrédients de l’église :
le socle
offert par le témoignage des Douze,
la parole
qui se transmet,
l’amour qui
circule.
Et
j’ajouterais : tout ce que Jésus, le frère aîné, nous laisse en héritage à
travers sa prière : l’unité, la joie, la consécration de soi dans la
vérité. Et finalement, la mission. « De même que tu m’as envoyé dans le
monde, moi aussi, je les ai envoyés... ».
On pourrait
en dire encore beaucoup. Je voudrais simplement terminer en posant la
question : et si c’était aujourd’hui ? Et si c’était aujourd’hui,
entre Ascension et Pentecôte, la naissance de l’église ? Quels sont nos
ingrédients ? L’église est toujours en état de naissance et les
ingrédients sont là : parole et vie, témoignage et amour, communion, unité
et respect des individualités. Et c’est là-dessus que va se répandre l’Esprit
de Pentecôte, l’Esprit qui va en quelque sorte passer tous ces ingrédients à la
cuisson du feu de Dieu : pour que ça « prenne ».
N’ayons pas
peur de l’appeler, au risque d’être saisis irrémédiablement dans le feu de cet
amour : « Viens, Esprit Saint ! ».
Sr Marie-Raphaël
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