dimanche 6 mars 2011

Sur le roc

partage pour la liturgie du 9ème dimanche du Temps Ordinaire A
(Dt 11,18.26-28.32; Ps 30,2-3a.3bc-4.17.25; Rm 3,21-25a.28; Mt 7,21-27)
 
Vous vous êtes courageusement levés, vous êtes venus à l’eucharistie dominicale, ou vous avez ouvert votre missel à la page du jour... j’ai envie de vous dire : tant pis pour vous ! Oui, tant pis pour nous, car nous voilà confrontés à la Parole de Dieu, et conviés non seulement à l’écouter, mais encore à la mettre en pratique ! Il y a grand risque que ce jour du Seigneur, jour de « repos » dominical ne nous laisse pas vraiment tranquilles !
 
Nous sommes devant quelques extraits de la Bible. Ils nous parlent de la loi et de la foi. Si le Deutéronome et l’Évangile semblent d’avis de nous inviter à mettre en pratique la Parole entendue afin de vivre ; st Paul (encore lui !) vient nous servir le grain de sable qui va faire grincer toute la mécanique : il nous dit « attention, les œuvres ne vont pas vous sauver : ce qui vous sauve du péché, de la mort, ce n’est pas la loi, c’est la foi !!! »
 
Ces textes sont-ils à jamais irréconciliables ? Reprenons doucement la lecture !
 
Le Deutéronome nous présente la loi de Dieu comme une proposition, un chemin que le Seigneur place devant nous en disant : « voilà, je t’ai choisi, je t’ai délivré de la servitude, j’ai fait alliance avec toi, je t’aime, si tu veux, je te propose le bonheur. Je ne vais pas te l’imposer, car l’amour n’impose rien. Je mets devant toi vie et mort, bonheur et malheur, choisis donc la vie, choisis le bonheur... » Ainsi, la loi est offerte non comme un carcan, mais comme un chemin, comme des balises sur le chemin, comme les berges d’un fleuve, elles aident le fleuve à s’élancer vers la mer, plutôt que de s’enliser en marécage... Choisis le fleuve ou le marécage...
 
St Paul, vrai juif, formé merveilleusement à l’école des rabbins de son temps, s’est élancé fougueusement comme un fleuve torrentueux. Il voulait la vie, non seulement pour lui, mais pour tout son peuple, il s’est posé en ardent défenseur de la loi, il a tenté de la mettre en pratique de tout son zèle. Il s’est heurté à ses propres limites... il a fait l’expérience de blessures en son être, qu’il n’a pu enlever par son observance. Surtout, il a rencontré le Ressuscité, et cela a bouleversé sa vie. Il a découvert combien ce qui importe : c’est la foi qui anime la vie de l’intérieur. Il a expérimenté en son être combien « la grâce de Dieu lui suffit, car la puissance de Dieu s’accomplit en sa faiblesse ». Il est devenu chantre du don de Dieu : de la grâce, du salut. La foi nous justifie, c'est-à-dire, nous ajuste au projet de Dieu, à son amour. « Si je n’ai pas l’amour, je ne suis rien... » écrira-t-il aux Corinthiens.
 
Vient alors l’Évangile d’aujourd’hui : la fin du sermon sur la montagne, tel que l’a rapporté st Matthieu. Nous en avons lu des extraits au long des dimanches précédents. Si vous avez du loisir, offrez-vous cette grâce de le relire d’un trait. Cela fait trois chapitres seulement.
 
Les disciples sont autour de Jésus. Ils l’entourent peut-être de toute leur révérence. Ils applaudissent : « Seigneur, c’est magnifique ce que tu as dit ! » Et Jésus répond : « Il ne suffit pas de me dire : Seigneur, Seigneur pour entrer dans le Royaume des cieux, mais il faut faire la volonté de mon Père qui est aux cieux ».
Quand je vous disais que la liturgie n’est pas de tout repos ! Nous avons bien prié, nous avons chanté « Seigneur prends pitié, gloire à Dieu ! » Ces prières, ces chants n’expriment-ils pas notre foi, comme y invite st Paul ? Jésus nous répond : La vie du Royaume ce n’est pas cela !
- Cela ne suffit pas ? Bon alors, écoute Seigneur, en ton nom durant la semaine, nous avons chassé les démons, en ton nom nous avons été prophètes, et puis ah oui, moi j’ai fait un miracle, moi aussi...
Et Jésus continue : je ne vous connais pas, écartez-vous de moi, vous qui commettez l’iniquité... « vous qui pratiquez la non-loi » pourrions-nous traduire...
 
N’est-ce pas rude à entendre ? Et dire que c’est la fin du discours sur la montagne. Allons-nous rester définitivement perplexes ? Jésus continue alors avec la petite image des deux hommes qui construisent leur maison. Ils œuvrent apparemment de la même manière. Un sur le roc, l’autre sur le sable. Les deux connaissent la tempête. Nul en cette vie n’est épargné, nul ne connaît une vie sans épreuve, sans nuage, sans tempête. Une maison s’écroule, l’autre tient... Et cette image illustre la différence entre celui qui écoute la parole et la met en pratique et celui qui écoute et ne met pas en pratique...
 
Les deux ont bâti une maison. On pensait : alors, les deux ont mis en pratique. Et bien non, celui qui met en pratique, c’est celui qui bâtit sur le roc. Tandis que celui qui bâtit sur le sable, même s’il bâtit une superbe maison, ne met pas en pratique.
 
Ici Paul rejoint Jésus... c’est la foi qui distingue les deux hommes, leur agir extérieur est identique, mais il est vécu différemment.
Bâtir sur le sable, c’est bâtir sur la Loi, sur les « œuvres de la Loi » qui « nous justifient ». Bâtir sur le roc, c’est peut-être faire les mêmes « œuvres », mais fondées sur la foi au Dieu de Jésus-Christ, en suivant la loi nouvelle : aimer Dieu et le prochain, avec une préférence pour les petits, les marginalisés, les oubliés,… N’être qu’amour.
 
Jésus nous invite à une cohérence de vie, que notre prière et nos actes soient emplis du même amour, de la même foi. Il s’agit de faire la volonté du Père des cieux : bâtir le royaume de justice et de paix, dans la fraternité et la solidarité, tel que Jésus a tenté de nous l’enseigner au long de ce discours sur la montagne. Laisser l’Esprit inspirer notre prière comme notre action pour être vraiment les enfants de notre Père des cieux.
Sr Thérèse-Marie 

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