Méditation pour la fête de St Pierre et st
Paul,
Actes 12,1-11 ; Ps 33 2-9 ; 2 Tim 4, 6-8.17-18 ; Mt
16,13-19
En écoutant ces textes, on finit par se demander s’il faut avoir fait de
la prison pour être disciple de Jésus. Les Actes nous rapportent que les
autorités politiques viennent de faire décapiter l’apôtre Jacques et
emprisonner Pierre. Selon la deuxième épître à Timothée, Paul serait en
captivité à Rome.
La prison est-elle le passage obligé du chrétien ? Heureusement non.
Ouf ! Mais n’est-ce pas l’expérience de la libération qui peu à peu prend
corps en nous et fait de nous des chrétiens ? Le chrétien est celui qui
vit la Pâque avec Jésus, et transmet à ses frères et sœurs, cette expérience. En
ce jour de jubilé nous pouvons y ajouter l’interrogation : l’expérience de
la vie monastique n’est-elle pas aussi expérience pascale ?
Nous pourrions avoir tendance à survoler le récit des Actes, en disant
que c’est typiquement de la littérature d’époque, qui se plait au merveilleux. Et
que ce n’est plus pour aujourd’hui. Mais si on creuse un peu, n’est-ce vraiment
pas d’actualité ?
L’auteur des Actes prend la peine de nous signaler qu’on est dans la
semaine de Pâque. Pâque ? Pour nous, célébration de la résurrection de
Jésus, à l’époque mémoire de la libération du peuple esclave en Égypte.
Que fait la liturgie en célébrant la Pâque ? elle nous raconte des
histoires ? et si en nous racontant des histoires, elle nous donnait des
clés pour lire notre histoire ?
En Égypte, le peuple esclave fuyard, sous la conduite de Moïse, a été
confronté à la mort : poursuivi par l’armée, menacé par les flots de la mer...
Pierre est enchaîné, gardé par des soldats.
Et nous qu’est ce
qui nous enchaîne, nous empêche de vivre ? En avançant dans la vie
monastique, dans la vie chrétienne, qu’avons-nous découvert comme
entraves ?
Pierre dort, c’est la nuit... tiens, n’est-ce pas de nuit que le peuple
est sorti d’Égypte ? Et nous
qu’est-ce qui fait nuit dans notre vie ?
Une lumière brilla dans sa cellule... une colonne de feu accompagne le
peuple. Quelle lumière avons-nous perçues au long de nos vies ? oh parfois
de faibles lumerottes… dans le prologue de la règle une voix crie : levons-nous donc enfin, tant que nous avons la
lumière de cette vie…
L’ange éveilla Pierre et lui dit : « Lève-toi vite » !
En grec deux verbes de résurrection (h;geiren auvto.n le,gwn\ avna,sta). Il lui dit : « Mets ta ceinture et tes
sandales ». Le peuple esclave en Égypte mange la Pâque à la hâte, la
ceinture aux reins et les sandales aux pieds.
Et Pierre est invité par l’ange, à sortir vite, dans la nuit, en suivant
l’ange. « Courons » nous
dit st Benoît.
Pour le peuple en Égypte, les eaux se sont fendues, l’armée a été
engloutie... Pour Pierre, les portes se sont ouvertes, et les chaînes sont
tombées... Au long de la vie monastique, notre
cœur se dilate dit Benoît… le Seigneur, peu à peu, lentement mais sûrement
nous met au large.
Pierre ne vient-il pas de célébrer la Pâque en vérité ? Non pas
comme on raconte une histoire du passé. Mais en faisant lui-même l’expérience
de la libération. En vivant la Pâque. Fort de cette expérience, Pierre pourra
annoncer la résurrection !
Le psaume nous a fait chanter : de
toutes leurs épreuves, Dieu délivre ses amis. Qu’est-ce à dire, sinon qu’à
chacun le Seigneur offre un chemin pascal.
Paul dans sa lettre qui est comme un testament atteste de l’expérience
de libération qu’il a connue tout au long de sa mission d’apôtre. Il parle des
difficultés de la mission, mais avec la certitude que la puissance de
résurrection du Seigneur est à l’œuvre.
Alors comment relire l’Évangile en ce contexte ? Pierre au nom des
disciples a répondu à la question de Jésus : « Pour vous qui
suis-je ? ». Il a confessé la foi, sur laquelle reposera l’Église :
« Tu es le Messie, le Fils du Dieu Vivant ! ». Jésus lui annonce
alors qu’il lui confiera les clés du Royaume. Il ne les lui confie pas au
moment même. Mais il lui annonce sa mission future. Sur le moment même, Pierre
a une connaissance encore un peu théorique de Jésus. Il sait qu’il est messie,
fils du Dieu vivant.
Lorsque Pierre aura fait l’expérience d’être libéré, pardonné, sauvé, comme
il en a fait l’expérience dans le regard de Jésus au soir du reniement, comme
il en a fait l’expérience au bord du lac un matin pascal, comme il en a fait
l’expérience en sortant de prison, alors il sera invité à partager à ses frères
et sœurs, cette puissance de libération, don du Ressuscité.
Je te donnerai les clés... je te donnerai d’aider tes frères à connaître
cette libération, cette pâque, en leur vie !
N’est-ce pas à ce partage pascal que nous sommes invités au fil des
jours, notre profession monastique, comme notre vie de baptisés est un appel à
vivre la Pâque toujours plus avant.